Plein vent

Acharnés à mourir

La crête lourde où le volcan rutile, combat démesuré de la nuit, vrille aux yeux des combattants, nus dans la neige ardente.
La mer amie qui berce, eau des fous, clapotis du sang.
Sauvagerie des corps griffés des rages de la lune, course des zèbres bleus.
Murmure des berges criminelles, appel acéré des nerfs, lèvres mouvantes des poignards !
La rauque lumière du matin, flamme noire qui fuse des ongles, les yeux de pourpre, dents creusées dans la chair calcinée des sexes.
Crachés du flanc des chèvres à tête de poisson, dans les ruisseaux argentés où frémissent les sorts, des cris glacés, rapaces longs, fouillent les bouches qu'exaspère la soif du sacre.

dans les eaux du repos,

Bleu quand la lumière émerge des sables, le soleil coule entre les cils le musc étoilé des courses immobiles.
O visage ogival, paix dans l'eau qui se calme pour toi, les bêtes ambiguës du soir paissent sur tes lèvres ondulées.
Mais quel est ce vent court, bourrasque dans ta gorge menacée ?
Quel effroi perçois-tu dans ces yeux d'orignal, fichés dans la peau de tes joues ?
Noyée d'eau blonde, enlacée par les doigts fanatiques, veille et dors, caresse.
Le fleuve s'écroule lent dans les fentes des terres qui s'ouvrent pour lui, dans les visages de la lune, acier noir des rivages saturniens.
Rose suspendue, miel des diamants, sommeil de gazelle contre le front qui rêve, frange.

exaltés pour la vie

Baiser de thym, lèvre écaillée, rire jasmin - sous le couteau, la plaie.
Aigu comme la plainte des élaps, c'est un cheveu mangé !
Qui est la mer où plongent les vertiges ?
Sur cette tige, je bâtirai, cascade, coulant du vent, entre les muscles, entre les dents !
Là-bas le triple feu, fusion du temps, tout est lancé, qui se retient ?
L'envol des plaines où sont couchés les cavaliers.
Claquant des crocs, doutant du dos, va titubant, bronze géant !
Pousse-la, mare de soufre, cette vie qui passe là t'emporte.
Près du grillon, grille cassée, ménétrier.
Plane en riant sous l'horizon, double marin !
malgré l'arrachement,

Dans la terre ouverte, indiscernable couple, sommeil enseveli, cimes constellées.
Brume légère, torride brume de l'arrachement.
Le froid dans le torrent, perles sucrées, c'est chaviré.
La forêt fondue sur les plages mortes, tout est lié, écartelé.
C'est le noir du feu, le blanc de la terre, pays de fumée.
À tâtons maintenant, du nord au sud, qui pourra vivre ?
Incolore et parfait dans la malédiction, aux quatre vents disséminé, qui aborde ?
Le sel du cuivre sèche avec la lenteur et la misère du crachin.
Sans ogive, plus d'architecture, plus de passage sans baiser de lune.
Rivé aux lumières d'orient, le vert désert du double coeur, cloche d'un sang dur comme les fours de la colère, t'égorge, futile muezzin.

météore stable.

L'absolu de la nuit.
Où courent les fourmis, rire exsangue des copulations.
À cheval sur la roue, fortune !
Brises, foncez ! La mer, c'est moi. Sait-on qui je porte ?
L'énorme joie du poulpe, la furie sereine de l'orage, allègrement, des pieds des poings, l'or des corbeaux !
Va riant, mon nez, tranche les poutres de l'ombre, maître des espaces éclatés !

Extrait des Fêtes sévères (1964).

Les Hauts-Fonds Éditions
© Les Hauts-Fonds
Collections Poésie et Porte-Voix

Valid XHTML 1.0 Strict CSS Valide !